From Faro with love

La première fois que nous nous sommes échangés nos voeux pour le nouvel an, j'ai été émue. Je n'en revenais pas qu'une banale discussion sur la plomberie ait pu nous mener si loin et je me demandais si, ensemble, nous verrions commencer d'autres années.

Tu m'as dit bien sûr. Tu m'as dit plein.

Nous sommes en 2013. Enfin.

J'ai détesté cette année 2012, t'imagines pas comme je vais essayer de vite l'oublier.

Toi avec.

Tu ne devais plus m'écrire,

je ne dois plus t'attendre.

Bonjour.

Aujourd'hui il pleut. C'est le moins qu'on puisse dire.

Cheveux mouillés, buée sur les verres. J'espère que tu as l'air con et que tes amis se le disent discrètement, en riant sous cape.

J'espère aussi que tu as le pouce des orteils mouillé. Ou les pouces. Je n'ai jamais su combien tu en avais.

Moi j'ai décidé de claquer un peu de flouze. A la caisse, la vendeuse pestait parce qu'elle avait du mal à retirer les boules de papier de l'intérieur de ces foutues chaussures trop serrées qu'elle avait à vendre. Et j'ai cru qu'elle allait pleurer quand elle a dit " mais ça ils s'en foutent là-haut. Ils sont tranquilles derrière leurs petits bureaux et ils ne pensent pas aux vendeuses dans les magasins !"

Je remarque deux choses.
La première c'est que là-haut c'est toujours rien que des petits enculés de leur race.
La seconde c'est qu'on a tous envie d'hurler: "soyez gentils avec moi !". Et que c'est beaucoup demander.

Voilà, ton évasion se compte maintenant en paires de mois et j’ai toujours mal. Super mal même.

Tu vois le loup blessé qui hurle au clair de lune près d’un lac scintillant ? Bah moi je suis la cheyenne dont le visage se détache dans le ciel en arrière plan. Et je pleure des larmes de sang. La vérité, mon frère.

Si tu savais comme tu me manques !  Je pourrais écrire des pages et des pages de comment tu me manques mais j’ai pas envie en fait.

Et sinon, tu reviens quand ? Les aiguilles tournent …

Reviiiens.

Je te raconterai des blagues des Opilantes.

Comme: Quelle est la différence entre une échelle et un camion ? Passer sous un camion ne porte pas malheur.

Et encore, c'est juste un avant-goût, j'en ai mille autres !

Je me déguiserai en raton laveur et je ferai la con dans la lumière de tes phares. Et si tu es accompagné, tu feras semblant de ne pas me connaître. Je ne m'en offusquerai pas.

 Aussi on fera de grandes virées à dos de chats géants sur les routes de l'amour. On sera trop des déglingos, on sera capables de traverser plusieurs départements et d'aller jusqu'à Chartres.

Je te préparerai de la macédoine chaude à tous les repas s'il le faut.

Mais reviens.

Je t'attends, lovely.

Doux Jésus de sa race !

Je ne sais pas si c'est judicieux de continuer à t'écrire comme ça. D'un côté ça m'apaise, ça me libère de tous ces mots qui se battent pour ne jamais arriver jusqu'à toi, de l'autre j'ai conscience d'entretenir un truc, de faire la Josiane qui va parler à son regretté Bibi au cimetière animalier d'Asnières. Et ça j'ai conscience que ça fait peine.

Le blog de la honte.

Mais c'est de ta faute Bibi !!

Ton départ a été si soudain. Je n'étais pas préparée.

Bien sûr j'avais remarqué que tu avais l'oeil moins vif et la queue moins frétillante -puis tu sentais fort- mais j'avais mis ça sur le compte de la chaleur estivale.

Certes je devais souvent t'appeler plus d'une fois pour que tu viennes jusqu'à moi, mais tu finissais toujours par arriver. Et tu laissais ta tête sur mes genoux, tandis que j'enlevais précautionneusement les crottes au coin de tes yeux.

Mon Bibi.

Je n'ai rien vu venir.

Hier j'ai marché par inadvertance sur ton hérisson. Autrefois c'était ton jouet préféré.

Je n'avais pas remarqué qu'il était cassé. Je me suis demandée depuis combien de temps il ne faisait plus pouik pouik.

J'étais contente, ça allait mieux.  Je laissais passer des paires d'heures entières sans penser à toi.

J'allais régulièrement sur ton profil Facebook te traiter de connard, les yeux dans les yeux.

Puis hier j'ai rêvé que tu m'avais écrit. J'ouvrais ton message en sautillant des doigts, je lisais que tout allait enfin, que la tempête était passée. Tu partais plus de ma vie, même que t'y revenais.Tout ça semblait n'avoir été qu'une parenthèse.

Et je me sentais bien. Vraiment bien. Un peu comme autrefois, lorsqu'aux soirées, et sous les applaudissements, tu me faisais tournoyer sans fin près des fontaines.

                                                    (clique sur nous si tu repaies ta tournée)

Oui donc voilà, tu as laissé passer notre anniv de rencontre virtuelle sans broncher.

J'ai un peu espéré, j'ai un peu été attentive. J'ai attendu un signe toute la sainte journée.

A minuit j'ai dû me rendre à l'évidence, il n'y aurait plus de grand oiseau blanc dans le ciel de cette journée. De merde.

Je ne te dis pas merci.

(et clique si t'as le courage de voir comme je chiale ma race)

Sinon je me demandais si tu travaillais toujours là-bas.

J'ai eu ma réponse.
J'aime autant te dire que je suis surprise de te savoir encore en vie. Honnêtement, je pensais que tu ne te relèverais pas de notre séparation.

Comme quoi la vie. Rien.

Autrement ça va un peu mieux. Ca fait plusieurs jours maintenant que je ne suis pas venue sous tes fenêtres la nuit, me frotter aux roues de ta voiture moche.

J'ai également cessé de fouiller tes poubelles.

Je deviens plus sereine et détachée par rapport à tout ça, crois-moi.

Puisque t'es pas mort, j'espère quand même un peu que tu vas bien. J'espère que tu ne bois pas trop, que tu n'as pas le coeur trop lourd.

Aujourd'hui je me dis que t'es rien qu'une petite garce. Lâche et menteuse.

Je m'en veux d'avoir voulu croire que j'avais fait l'une des plus belles rencontres de ma vie. Et j'en veux à ton égo. Que je regrette d'avoir tant flatté.

Hier, suite au grand bug Facebook, j'ai été amenée à te relire un peu. Et ça m'a fait sourire. Voire même ça m'a touchée.

Mais c'était hier et aujourd'hui je te hais.

Bonjour.

Mercredi. Du soleil en veux-tu en voilà dans ta petite gueule. C'est bien, ça fait plaisir.

Ici ça va. Tu penses.

Chaque jour j'apprends à profiter de tout ce temps libre que tu m'as laissé. Mine de rien ça en fait beaucoup.

La maison n'a pas été propre comme ça depuis 2010.

Cependant ça pue. Figure-toi qu'un chat vient gicler ici chaque nuit que Dieu fait.

Au début j'ai cru que c'était toi. Mais je ne reconnaissais pas ton odeur.

Finalement mes doutes ont été complètement dissipés quand j'ai grillé le coupable. Un enfoiré de chat donc.

J'ai beau laver par terre et relaver par terre, rien n'y fait. Ça sent.

Voilà pour l'ambiance olfactive. Mais sinon ça va super bien. Je me sens un peu comme si je traversais l'océan à dos de poissons volants. Avec un petit sourire satisfait accroché au visage.

Voilà, c'est tout à fait ça.